OM Olympique de Marseille

1962, la r�ussite d'Otto Gloria

Messies, proph�tes ou dictateurs "hommes providentiels" ont ceci en commun de n'appara�tre qu'en p�riode de crise.
Au plus noir de son oubli, l'O.M. vit donc venir � lui un sauveur. Qui, par un coup de chance inou�, n'�tait pas un imposteur.
Le cheveu noir et l'oeil langoureux, il avait l'apparence d'un ancien danseur de tango reconverti dans le n�goce du caf�.
Il �tait Br�silien, placide, intelligent, et s'appelait Otto Gloria.
Un nom pr�destin�.
Demeur� magique en tout cas dans l'esprit des Marseillais. Il est vrai que l'aventure de ce voyageur d�bonnaire, rond et jovial jusque dans sa moustache dariomor�nesque, peut �tre qualifi�e d'extraordinaire :
En 16 semaines, il parvenait � ramener le club en division I. Puis s'en allait pr�cher ailleurs.
A son arriv�e, le 2 f�vrier 1961, Gloria �tait inconnu.
Du moins chez nous, car il avait entra�n� plusieurs grands clubs br�siliens (America, Vasco De Gama) et portugais (Sproting, Benfica) avec un certain bonheur.
Il venait succ�der � Lucien Troupel subitement d�barqu� par Saby Zaraya lequel � vrai dire r�vait depuis pas mal de temps d�j� de s'offrir un messie.
Car si Troupel connaissait bien l'O.M. (il y avait jou� trois ans durant la guerre et s'�tait mari� � Marseille), il tardait � le replacer sur le chemin du succ�s. 10e en 1960, 6e l'ann�e suivante, le club semblait avoir encore manqu� l'ascenseur pour la D.I. lorsque, le 24 janvier 1962, le couperet tomba sur la t�te de l'entra�neur.
Il s'ensuivit une p�riode de flottement au cours de laquelle chacun s'interrogea : qui donc allait bien pouvoir venir ramer sur la gal�re marseillaise ?
Pendant que dans la presse locale apparaissaient les noms des premiers sauveurs potentiels (Julien Da Rui et l'Italien Giuseppe Meazza),
pendant qu'en fait de sauveteur certains pr�conisaient � M. Zaraya de se sauver tr�s loin, Roessler, l'entra�neur des juniors accompagnait l'�quipe � Clermont o� le 28 janvier elle rencontrait Belfort en 16e de finale de la Coupe.
Un adversaire modeste, tr�s modeste m�me, anim� par Clog, Egloff, Nadykoff et les rois fr�res Klingelschmitt.
Pour qui Moreira, P�rard, Knayer, Alauzun, Bruneton, Tell�ch�a, Pavon, Tivoli, Sansonetti, Aygoui et Lef�vre �taient cependant tenus en �chec, 0-0 apr�s prolongations. .
C'est sur ces entrefaits qu'�tait annonc�e l'arriv�e d'Otto Gloria en provenance du Portugal.
Arriv�e annonc�e en exclusivit� par Pierre Andreis de La Marseillaise. Cette r�v�lation provoqua quelques remous puisque Lucien Troupel lui-m�me, apprit la nouvelle de son limogeage � la lecture du journal.
Le 2 f�vrier Gloria dirigeait l'entra�nement en short et tee-shirt.
Deux jours plus tard, � Mulhouse, l'O.M. se d�barrassait enfin de Belfort (3-1) gr�ce � trois buts de Milazzo qui faisait sa rentr�e.
Une longue s�rie de succ�s venait de commencer.
Sous la direction de Gloria, l'O.M. allait perdre un seul match de Championnat et tomber en quart de finale de la Coupe, � Grenoble, contre Angers dans des circonstances particuli�rement houleuses.
Les Marseillais ce jour-l�, �voluant dans un environnement peu favorable (ils avaient �limin� le F.C. Grenoble au tour pr�c�dent), n'�taient gu�re aid�s par l'arbitre, M. Dhumerelle, qui oubliait de siffler un penalty en leur faveur, alors que l'Angevin Marcel Loncle reconna�trait aux vestiaires avoir arr�t� le ballon de la main.
De surcro�t, M. Dhumerelle �courtait la partie de cinq minutes.
Ils �taient donc �limin�s (1-0) sur un penalty r�ussi par C�lestin Oliver,le vieux renard tansf�r� en Anjou quelques mois plus t�t.
Il en r�sulta de vilaines sc�nes, non pas sur le terrain, mais sur les gradins o� certains supporters marseillais se conduisirent de fa�on indigne.
Tandis que dans le vestiaire olympien r�gnait l'atmosph�re que l'on devine.
Les joueurs prestaient contre l'arbitre : Saby Zaraya ivre de rage, contre l'humanit� tout enti�re.
C'est alors qu'Otto Gloria qui s'�tait attard� au-dehors pour suivre les incidents fit son entr�e. Hilare
- Y� n'avais jamais vou c�l�, s'esclaffait-il, la moustache en arc de cercle? Non vraiment, d� tout� ma carri�r�, y� n'avais yamais vous oun arbitre aussi marrant ! Et vous pr�sident...?
Eh oui, Otto Gloria avait le sens de l'humour, vertu pr�cieuse s'il en est qui devait lui �viter de jamais se prendre aux s�rieux tout en �tant un grand professionel.
Toujours, ses �quipes chant�rent. Y compris la s�lection nationale portugaise qu'il conduisit � la 3e place de la Coupe du Monde en 1966.
Tout bonnement parce qu'il avait l'art de mettre les joueurs en confiance, de les r�v�ler � eux-m�mes.
A son arriv�e � Marseille il avait trouv� des hommes apeur�s, doutant de tout et surtout de leur talent.
Surentra�n�s de surcro�t par le biais d'un cercle infinement vicieux : plus ils perdaient et plus ils s'entra�naient...
Son premier soin avait �t� de rendre un ballon � ses joueurs, de supprimer les exercices purement physiques et de raccourcir les s�ances de travail qu'il dirigeait parfois de la touche - en costume - quand il souffrait d'une crise de rhumatismes.
Aussi, de ranimer les �nergies : il persuadait ses joueurs qu'ils allaient gagner : et ils gagnaient.
Sa formation d'entra�neur de basket (il �tait dipl�m� dans les deux disciplines) l'avait �galement habitu� � modifier tr�s vite telle ou telle disposition tactique, � improviser constamment.
L'OM. sous sa direction, devait tr�s souvent faire la d�cision en seconde p�riode, apr�s qu'il avait fait permuter les ailiers - pour qu'ils puissent mieux tirer au but - ou les arri�res, afin de mieux contrer les attaquants adverses.
Au niveau de la composition de l'�quipe, il avait apport� quelques retouches aussi, faisant d'Henri L�onetti un v�ritable titulaire, �cartant le vieux Fritz Kominek par qui tous les ballons passaient jusque-l�.
Et puis, il avait fait une trouvaille d�cisive : Andr� Moulon, un Paul Newman �l�gant et superbe de sang-froid qui, � 26 ans, se morfondait en �quipe r�serve. Il en avait fait la cl� de vo�te de sa d�fense soudain stabilis�e.
Et L'O.M. rattrapant le terrain perdu, avait arrach� une 4e place synonyme de paradis retrouv�.
Pour peu de temsp, h�las ! Une fois �teints les lampions de la f�te, la nuit se ferait plus �paisse.
Car Gloria, parti au Br�sil, apr�s l'accession n'en reviendrait pas.
Beaucoup de contrev�rit�s ont �t� �crites � ce sujet.
On a pr�tendu, par exemple, que, devinant le sort qui attendait l'O.M. il avait prudemment choisi la fuite.
C'est faux comme il �tait fausse la l�gende voulant qu'il n'ait jamais jou� au football (il avait op�r� � Vasco de Gamma et � Botafogo avant d'�tre s�rieusement bless� en 1944).
En fait, Otto Gloria avait des int�r�ts financiers au Br�sil. Une fabrique de conserves, notamment qu'en son absence un associ� faisait fonctionner.
Le brusque d�c�s de celui-ci le contraignit � aller mettre de l'ordre dans ses affaires.
En s'embarquant pour Rio, Gloria savait donc qu'il ne reviendrait pas Ses joueurs aussi, � qui il avait fait ses adieux.
La chance, un instant apprivois�e, tournait le dos derechef � Saby Zaraya.


Otto Gloria est mort le 2 septembre 1986.
Il laissera un souvenir
imp�rissable au V�lodrome
Ne voulant pas commettre deux fois la m�me erreur, il se gardait bien d'effectuer comme en 1958, un recrutement de prestige que les finances du club eussent d'ailleurs difficilement support�.

Alain P�cheral
La Grande Histoire de l'OM
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